LE JOURNAL N°120
ANTIBIOTIQUES DANS VOTRE ASSIETTE
1- Usage des antibiotiques.
2- Allergies : un risue sous-estimé.
3- Des bactéries qui résistent.
4- L'élevage intensif en cause.
5-Fraude en roue libre.
Utilisés pour soigner les animaux et aussi pour les faire grossir plus vite, les antibiotiques jouissent d'un franc succès auprès des éleveurs. Avec, à la clé, un risque de plus en plus menaçant : l'apparition de microbes résistants à tout médicament.
Championne du monde de la consommation de médicaments destinés à l'homme, la France n'est pas en reste en ce qui concerne ceux donnés aux animaux. Avec près de 30% du marché de l'Union européenne, elle arrive même largement en tête des Quinze pour l'utilisation des médicaments vétérinaires.
1- Usage des antibiotiques.
Si chiens et chats domestiques en sont abreuvés, c'est aux élevages qu'est destiné le gros de la production. D'où une amélioration incontestable de l'état sanitaire des animaux : des épidémies, naguère capable de décimer des troupeaux, sont éradiquées. La médaille a cependant son revers car l'utilisation de médicaments n'est jamais anodine. Ainsi, des résidus médicamenteux toxiques peuvent se trouver dans les différentes sortes de viande commercialisées, risquant de provoquer diverses troubles chez l'homme (allergies et intoxications).
Les effets pervers de la surmédicalisation sont encore plus inquiétants dans le cas des antibiotiques. Ces derniers, dont le succès ne se dément pas sont utilisés selon 3 modes.
En traitement curatif, lorsqu'un animal est malade; en traitement préventif, pour éviter la propagation d'une maladie lorsque plusieurs animaux du troupeau en sont atteints, on traite alors l'ensemble du cheptel; enfin comme additifs aux aliments. Dans ce dernier cas, ils agissent comme des promoteurs de croissance : certains antibiotiques intégrés en faible quantité à l'aliment permettent, en effet, d'améliorer le rendement des animaux. A ration égale, ils prennent d'avantage de poids. Il ne s'agit donc pas de protéger la santé de l'animal et, au-delà, la nôtre, mais uniquement d'augmenter la rentabilité.
AVOPARCINE : UN ANTIBIOTIQUE BIENTÔT INTERDIT.
Utilisé de puis 20 ans comme promoteur de croissance, l'avoparcine, un antibiotique, a selectionné des bactéries résistantes, susceptibles d'être transmises à l'homme.
Le problème est qu'elles résistent aussi à un antibiotique à usage humain de la même famille, la vancomycine. Or, ce médicament est très précieux, car prscrit en dernier recours contre des microbes résistants à tous les autres antibiotiques. Si on continue à répandre de l'avoparcine, on risque de propager la résistance à la vancomycine chez des microbes dangereux pour l'homme contre lesquels on ne disposerait plus d'aucune arme.
2- Allergies : un risque sous-estimé.
Quoique marginal, le risque d'allergie lié à la présence de résidus d'antibiotiques dans les viandes ne fait aucun doute.Une femme de 64 ans victime de deux chocs graves après avoir consommé du porc et du boeuf. Des tests ayant démontré que cette patiente n'était pas allergique à ces viandes, les médecins en concluent à la "culpabilité" de résidus d'un antibiotique, la pénicilline, présents dans le saucisses et le steak qu'elle avait consommés.
Si la consommation de produits très faiblement "contaminés" se répète trop souvent, l'organisme se sensibilise peu à peu. La probabilité d'accident grave augmente alors en cas d'exposition à une dose plus forte.
3- Des bactéries qui résistent.
Le problème des allergies demeure cependant bien anodin en regard du risque majeur lié à l'utilisation d'antibiotiques : la multiplication des résistances chez les bactéries.
Dès lors qu'on utilise un antibiotique, se crée une "presssion de sélection". C'est-à-dire que les microbes s'adaptent et résistent à cet antibiotique. Certaines bactéries sont devenues résistantes à plusieurs familles d'antibiotiques et on voit réapparaître des pathologies qu'on croyait en voie d'éradication comme la tuberculose. On a de plus en plus de difficultés à soigner certaines maladies.
"L'homme est directement menacé" :
La contribution des antibiotiques vétérinaires, utilisés pour soigner les animaux ou pour accélérer leur croissance, est loin d'être négligeable : au-delà du problème des résidus médicamenteux susceptibles de se retrouver dans la viande, la supplémentation des aliments animaux en antibiotiques semble inquiétante car, même si les doses sont faibles, ces substances se concentrent dans le tube digestif des animaux. Cette accumulation engendre l'apparition de microbes résistants. Ces bactéries très tenaces, vont se retrouver dans les excréments des animaux puis dans l'eau et, plus largement, dans tous l'environnement. L'homme est donc directement menacé.
4- L'élevage intensif en cause.
L'utilisation d'antibiotiques en tant que médicaments est aussi parfois sujette à caution. C'est le cas lorsqu'elle remédie à un manque d'hygiène ou à l'inadaptation de méthodes d'élevage orientées vers la rentabilité. L'élevage intensif, avec ses animaux dopés pour grandir plus vite, ses batteries de poulets entassés, ses veaux enfermés par centaines dans des étables à l'atmosphère viciée, rend quasi inévitable l'abus d'antibiotiques. C'est d'ailleurs dans des ateliers d'élevage intensif de veaux que l'on a découvert pour la première fois, dans les années 70, l'apparition de résistances chez certaines bactéries,les salmonelles.
Il est de notoriété publique que, dans l'élevage en batterie,la fréquence des maladies et des trraitements est bien supérieure, à cause de la promiscuité et de la difficulté à nettoyer les locaux.
Rien de tel que de maintenir les animaux au grand air pour éviter les maladies, c'est scientifiquement prouvé !
5- Fraude en roue libre.
La viande fournie par les éleveurs ne doit pas dépasser un certain taux de résidus d'antibiotiques. Chaque année, les contrôles officiels détectent des infractions...sans que les sanctions suivent.
Lorsqu'un fabricant de médicaments vétérinaires souhaite commercialiser un nouveau médicament, il doit obtenir une autorisation de mise sur le marché délivrée par l'Agence nationale vétérinaire (AMM). Remis par l'industriel aux experts de l'Agence, le dossier doit comporter, en autres, des tests de toxicité aigue et chronique. Des tests qui doivent montrer que ce médicament ne fait pas courir de risques à ceux qui consomment des animaux traités.
Des milliers d'éleveurs contrôlés :
L'AMM est accordée pour des conditions d'utilisations bien précises : dose d'emploi, mode d'administration, temps d'attente entre l'administration du médicament et l'abattage de la bête... Pour chaque médicament sont aussi définies des limites maximales de résidus (LMR) dans la viande et, le cas échéant, le lait. Elles correspondent au seuil en dessous duquel il n'y a pas de risue toxique pour l'homme (du moins en théorie, car les LMR correspondent parfois aux limites de détection des méthodes d'analyse).
Si les conditions d'utilisations sont respectées, les LMR ne sont normalement aps dépassées. Le contrôle des résidus s'exerce chaque année, en France comme dans tous les Etats membres de l'Union européenne, dans le cadre de "plans de surveillance" dont les modalités sont définies à Bruxelles. Faute de pouvoir tout contrôler, ces plans jouent un rôle de veille sanitaire et visent à éviter les dérives trop flagrantes.
Le contrôle des résidus d'antibiotiques est prioritaire par rapport à ceux portant sur les autres médicamnets, les anabolisants, les métaux lourds, etc...
Les contrôleurs les recherchent dans quelques trente-deux mille écahntillons de viande chaque année. En 1995, 1% d'entre eux contenaient des résidus d'antibiotiques. Si ce chiffre n'a rien d'astronomique, on arrive environ à trois cent vingt échantillons positifs, soit des dizaines d'éleveurs (et parfois vétérinaires) n'ayant pas respecté la règlmentation.
Quelles ont été les sanctions prises à leur encontre ? "Ca finit par un non-lieu".
Il arrive que des dossiers de fraudes monumentales soient transmis aux juges et que ça se termine par un non-lieu. Dans la mesure où on ne peut contrôler tout le monde, ni repérer toutes les infractions lors des analyses (les méthodes d'analyses de résidus d'antibiotiques étant peu perfectionnées, seuls les fraudes les plus grosses sont repérées), les plans de surveillance ne sont guère dissuasifs. Si les sanctions ne le sont pas non plus, on voit mal ce qui peut inciter les éleveurs à respecter la réglementation.